Société

Médias en Haïti, chronique d’un mal profond

Du musellement des médias, de média unique et propagandiste, de l’exil et de meurtres de journalistes sous la dictature, la presse haïtienne est passée à une émancipation spectaculaire, trente sept ans après. Néanmoins, se conformer aux normes internationales, demeure la plus grande faiblesse des médias haïtiens qui font face à de nombreux défis.

 

L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a rendu public ce jeudi 9 février 2023, une étude sur le développement des médias en Haïti, dans laquelle des recommandations ont été formulées pour réguler et développer le secteur .Cette étude souligne la prolifération des médias (Télévision et Radio) au su et au vu du CONATEL, organe régulateur le secteur.

C’est une étude réalisée par l’UNESCO sur le développement des médias en Haïti. Elle se veut le reflet fidèle de l’environnement du développement des médias dans le pays et tracer des pistes pour de futures recherches plus actuelles dans le secteur.

Le Travail est accentué sur le système de régulation des médias haïtiens ; le niveau de pluralisme et de diversité ; le rôle des médias comme plateforme pour un débat démocratique ; la formation professionnelle et soutien aux institutions de formation pour promouvoir la liberté d’expression et l’existence de capacités infrastructurelles suffisantes pour soutenir des médias.

Selon cette étude reprenant des données datant de 2016-2017, le pays compte maintenant plus de 600 stations de radios, dont la moitié émet sans autorisation, une trentaine de radios communautaires, et près de 150 chaînes de télévision, à l’audience toutefois limitée alors que dans le temps, le paysage audiovisuel se limitait à une poignée de radios (6), la chaîne commerciale Télé Haïti inaugurée en 1959, et la Télévision Nationale d’Haïti créée vingt ans plus tard.

Selon l’étude financée par l’UNESCO, cette explosion est tributaire de la démocratisation consécutive à la chute du régime Duvalier, mais aussi par les carences du système de régulation actuel. « Sur un marché aussi étroit, de nombreux interlocuteurs interrogés dans le cadre de cette étude déplorent une course à l’audience qui encourage souvent le sensationnalisme », souligne l’étude.

Là où le bât blesse, selon cette étude, c’est au niveau de la protection des journalistes. Le rapport indique que les attaques sont fréquentes contre les journalistes leurs auteurs sont rarement traduits en justice. « Une insécurité qui renforce la précarité des journalistes, par ailleurs peu rémunérés, pas toujours formés, et souvent contraints d’exercer simultanément d’autres activités professionnelles », dit-il.

2022 a été particulièrement une année noire pour les journalistes. Au moins 3 ont été tués au cours su premier trimestre. L’année 2023 ne présente pas les mêmes caractéristiques, mais l’enlèvement du Journaliste Jean Thony Lorthé et les conséquences qui en découlent montre à quel point le travail est risqué.

Ces genres de situation, selon l’étude, poussent souvent les médias ou les journalistes à se garder généralement d’enquêter sur les sujets sensibles tels que la corruption ou le trafic de drogue. « Ils reprennent le cas échéant les rapports d’organisations de défense des droits humains, plutôt que de produire leurs propres investigations », note le rapport.

De sérieux problèmes se posent aussi au niveau de la législation haïtienne avec des lois, selon l’étude, qui mérite d’être révisées. L’étude croit qu’en concertation avec la société civile et les professionnels du secteur, l’État devrait réviser les lois sur l’audiovisuel pour faire du CONATEL une autorité de régulation indépendante et efficace, dotée du mandat et des moyens de promouvoir le pluralisme, l’équité et la liberté d’expression tout en révisant aussi l’ensemble des dispositions légales restreignant la liberté d’expression, de façon à les mettre en conformité avec la Constitution et les standards internationaux, et à les rendre pleinement applicables au monde contemporain.

L’étude prône une dépénalisation de la diffamation contrairement à l’article 28-3 de la constitution 1987 amendée.

« L’État devrait mener à bien la transition vers la télévision et la radio numériques, de manière concertée et inclusive, de façon à réduire la saturation des réseaux de diffusion traditionnels et à favoriser le pluralisme et la diversité du paysage audiovisuel », recommande l’étude qui croit que l’État devrait transformer la Télévision Nationale d’Haïti et la Radio Nationale d’Haïti en un service audiovisuel public indépendant, conforme aux standards internationaux.

A cette fin, toujours selon l’étude, l’État devrait « revoir le mandat de la TNH et de la RNH pour y introduire des impératifs d’équité, de pluralisme et d’impartialité, ainsi que la nécessité de prendre en compte les besoins des segments marginalisés de la population ; Priver le pouvoir exécutif de tout pouvoir de nomination des dirigeants et administrateurs de ces médias, et intégrer la société civile à leur gouvernance, de façon à les rendre responsables devant le public plutôt que devant le gouvernement. »

Les recommandations faites par l’UNESCO sont multiples. Ils croient mordicus que des dispositions doivent être prises en vue d’avoir un paysage médiatique conforme aux normes internationales.

JD

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