novembre 21, 2024
DOSSIER

Laboule 12, un mouroir à ciel ouvert!

Il n’existe aucun bilan, aucune statistique, aucune donnée officielle sur le nombre de personnes tuées ces derniers mois à Laboule 12, une zone perçue comme un mouroir à ciel ouvert. Ce quartier de Pétion-Ville a basculé dans le chaos total depuis l’éclatement d’un conflit terrien entre les partisans du chef de gang nommé Ti Makak et ceux de Toto, un riche propriétaire de la région.

 

Comme dans un film d’horreur, à Laboule 12, tous les crimes sont permis et deviennent monnaie courante depuis un certains temps. Impossible de fréquenter la route sans risquer une attaque de bandits armés. Les gangs qui s’affrontent depuis plusieurs mois dans cette zone rançonnent les chauffeurs de taxi-motos, kidnappent, tuent et installent un climat de terreur chez les usagers de cette route.

Deux groupes s’affrontent dans le secteur sur fond de conflit terrien. L’un est lié à un homme d’affaires, grand propriétaire terrien, Monsanto Petit dit Toto et l’autre est mené par Ti Makak un jeune né dans le quartier de Laboule 12, immense territoire qui relie Port-au-Prince, Carrefour et les hauteurs de Pétion-Ville.

La situation a pris une autre tournure avec la mort de deux journalistes, Wilguens Louissaint et Amady John Wesley, au cours du mois de janvier de l’année 2022. Ils ont été tués dans une fusillade, dans le cadre de leur travail. Un troisième journaliste qui les accompagnait, a pu s’enfuir.

Le 6 août 2022, à Laboule 12, Yvon Buissereth, ex-sénateur de la république et directeur d’alors de l’Entreprise Publique pour la Promotion de Logements Sociaux (EPPLS) et un proche ont été tués à un moment où le chef de gang dénommé Ti Makak faisait parler la poudre pendant de longues heures. Depuis, cette zone se ressemble de plus en plus à une véritable vallée de l’ombre et de la mort.

Environ deux mois plus tard, le 28 octobre, Éric Jean Baptiste, secrétaire général du Rassemblement des Démocrates Nationaux Progressistes (RDNP) et ancien candidat à la présidence d’Haïti, a été tué par balles sur la route menant à son domicile à Laboule 12. Des hommes lourdement armés ont criblé de balles le véhicule dans lequel il se trouvait. Son agent de sécurité est décédé sur place. Éric Jean Baptiste avait été conduit vainement à l’hôpital.

Suite à l’assassinat d’Éric Jean Baptiste, les gangs qui règnent à Laboule 12 ont semblé avoir compris la nécessité d’observer une pause, afin de permettre à la population de digérer le drame. Une pause de très courte durée. Les membres des gangs ont repris du service, ils déversent leur fiel sous les regards impuissants des agents de la PNH. La population qui vit au jour le jour doit s’accomoder avec cette situation.

Mardi dernier, la zone de Laboule 12 a été très mouvementée. Les deux camps se sont encore livrés dans un duel sans merci. On rapporte que des décès ont été enregistrés. Trois membres d’une même famille ont été enlevés par des hommes armés. Plusieurs minibus ont été détournés ; des passagers kidnappés.

Dans l’après-midi de ce mardi, l’avocat Salim Succar a subi une attaque armée. Une photo du véhicule dans lequel se trouvait l’homme de loi a fait le tour des réseaux sociaux. Des impacts de balles sont remarqués sur le pare-brise du véhicule. Me Succar a échappé de justesse à l’attaque.

Mercredi, les hommes armés de Carlo Petit-Homme alias « Ti Makak » ont, une nouvelle fois, fait des victimes. Dans une vidéo virale sur les réseaux sociaux, cette bande armée a présenté les têtes de 3 personnes, attestations à la main, ils les ont identifiées comme des policiers. Une source policière a confié à la rédaction de Radio PBS qu’il ne s’agissait pas réellement d’agents de la Police Nationale d’Haïti.

 

Les dessous du conflit terrien

Il faut remonter à 2020 pour comprendre la réalité à Laboule 12. Selon une enquête du media Ayibopost, les paysans et travailleurs de la localité de Fessard célébraient la Notre-Dame des sept douleurs le 15 septembre 2020 lorsqu’un concert d’armes automatiques explose le calme de cette localité à la verdure luxuriante dans les hauteurs de Port-au-Prince, en raison d’un conflit latent entre l’entrepreneur Jean Mossanto Petit, dit Toto Borlette, et le chef de gang Ti Makak, ainsi connu, pour 30 à 117 carreaux de terre.

Les terrains disputés se trouvent dans la 3e section Étang du Jonc. Ils appartiennent à l’État et ont été affermés à des paysans de la zone, pendant plusieurs générations.

Selon Ayibopost, les grands-parents de Ti Makak occupaient une portion de ces terres. Cependant, le caïd en question n’habitait pas la localité. Ti Makak est retourné dans la zone après que Toto Borlette aurait déclaré avoir acheté toutes les terres qui se trouvent dans la localité.

Selon un citoyen de Laboule 12 contacté par AyiboPost et qui requiert l’anonymat, Toto a acheté des terrains entre les mains de certains paysans à un prix dérisoire pour notamment construire une villa dans la zone.

Pour imposer sa volonté, Toto aurait engagé les hommes de Chrisla, puissant chef de gang de Ti bois, une localité de la 3e circonscription de Port-au-Prince. En réponse, Ti Makak a engagé les hommes de Grand Ravine dirigés par Ti Lapli. Et depuis, Laboule 12 s’est transformé en un champ de bataille, à l’instar des quartiers de Martissant et de Fontamara.

 

RPBS

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