Augmentation des prix du carburant : Le gouvernement semble faire face à un échec
Le gouvernement a décidé d’augmenter, dimanche 11 septembre, les prix des produits pétroliers sur le marché. Une décision qui a engendré la colère de la population quelques instants plus tard. Analysant les faits, le pouvoir en place, malgré ses multiples organes de communication, n’arrive pas à en faire bon usage, surtout en ce qui concerne cette décision qui a connu, jusque-là, un échec cuisant.
Plus d’un ne s’y attendait pas. Cette décision effusive a donné le vertige. L’esprit haïtien n’était pas disposé ces dernières semaines à accepter une telle décision pratiquement impopulaire.
L’histoire nous ramène à la fin de l’année 2021. Plusieurs canaux de communication avaient été utilisés pour porter les haïtiens à croire que l’État ne disposait plus des dizaines de milliards de gourdes pour continuer de subventionner le carburant chaque année. Un coup qui avait pourtant réussi. La reproduction du théâtre du 6-7 juillet 2018 à laquelle tout le monde s’attendait ne s’était pas produite. La population attend jusqu’à ce jour les vaines promesses du gouvernement. Entre temps, la misère gagne plus de terrain. La pauvreté atteint son apogée.
Cette nouvelle augmentation des prix des produits pétroliers, le 14 septembre 2022, a plutôt eu l’effet inverse. La population a craché feu et flamme dans la capitale comme dans les villes de province. Des scènes de pillage, de vandalisme, des morts, des blessés par balles, des manifestations en cascade ont été enregistrés. Les régions se réveillent au quotidien dans un épais brouillard de fumée.
Tout résulte d’un déficit de communication grave au niveau du gouvernement. Aucun autre moyen de communication, qui pouvait accompagner la décision de revoir à la hausse le prix des produits pétroliers, n’a été mis en place à l’instar de décembre 2021. Pas d’émission spéciale sur la subvention du carburant, pas de spots publicitaires, aucune forme de campagne de communication notamment dans les médias d’État.
Les velléités du gouvernement n’ont pas été bien exprimés ou pas été exprimées tout carrément. Les mesures d’accompagnement des familles au temps de l’augmentation des prix des produits pétroliers n’ont pas été véhiculées.
Pourtant, les faits sont là et sont bien avérés. La subvention du carburant coûte à l’État haïtien plus de 50 milliards de gourdes par an. Un montant qui équivaut à deux fois la masse salariale des fonctionnaires publics alors que le gouvernement peine à réaliser des programmes sociaux à hauteur de 3 milliards de gourdes.
Le gouvernement, selon nos informations, entend accorder une subvention s’apparentant à un 14e mois aux fonctionnaires publics à la veille de la rentrée scolaire. Il entend également, avec l’aide du secteur patronal, ajuster le salaire des ouvriers de la sous-traitance, ensuite encourager les institutions privées à augmenter le salaire de leurs employés, planifier des programmes d’assainissement dans les quartiers via certains ministères et préparer des paniers de solidarité entre autres. Le plan est bien ficelé.
Outre des mécanismes d’appui, l’Etat entend notamment lutter contre les spéculations et travailler à plafonner certains prix.
Toutefois, ces informations sont restées hermétiquement fermées dans les tiroirs des instances de communication gouvernementale. Depuis des semaines, on assiste à une contre-offensive des messages de certains hommes et femmes politiques dans les médias pour discréditer la décision du gouvernement qui n’était jusque-là pas encore prise.
Qui n’a jamais entendu des déclarations incendiaires sur une possible augmentation du prix du carburant? À cela, il faut ajouter les fausses informations créées à dessein que des gens honnêtes partagent de bonne foi.
Fort de son ignorance et son manque d’information, la population a cru tout ce qui s’est dit dans la presse déjouant les véritables plans du gouvernement. Elle se mettait à comprendre que la mesure prise pour augmenter les prix des produits pétroliers est un véritable affront, une déclaration de guerre. Surtout, quand elle sait que cette augmentation aura des répercussions sur les prix du transport public sans oublier les produits de première nécessité. Ce qui réduira au double voire au triple son pouvoir d’achat. La population ne saurait réagir autrement.
Tout gouvernement doit s’assurer de se faire comprendre par son peuple en développant des mécanismes de communication clairs et précis. Est-ce l’absence d’un porte-parole au gouvernement qui leur met dans cette situation de handicap? Tout porte à croire que Ariel Henry et son cabinet ministériel se sentent on ne peut plus confortable même avec l’effervescence des rues.
DJ